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Pierre-Luc L’Hermite publie un nouvel ouvrage. Echanges.

L’ostéopathie est aujourd’hui une discipline reconnue sur le plan juridique ainsi que dans le paysage sanitaire. Toutefois, l’enjeu de sa légitimité, en tant qu’exercice de soin récent en comparaison à la médecine conventionnelle, doit en partie passer par la rationalisation de la démarche qu’elle propose. Cet impératif exige d’être appréhendé comme une discipline susceptible d’être saisie par la science. Le Dr Pierre-Luc L’Hermite, ostéopathe et docteur en droit,  intervenant à l’Institut Toulousain d’Ostéopathie, interroge cette possibilité dans son nouvel ouvrage Introduction à la science ostéopathique. Approche épistémologique, tout juste publié aux éditions Ellipses.

 

Pourquoi envisager l’ostéopathie comme une science ?

 

C’est sans doute, justement, l’occasion de commencer par expliquer qu’elle n’en n’est pas une. Pas plus que la médecine conventionnelle d’ailleurs, bien qu’elle soit parfois ainsi décrite lorsqu’il s’agit de mettre en avant le fait qu’elle repose sur une base de connaissances solides et indiscutables. Cette dernière est classiquement décrite comme un art au carrefour de plusieurs sciences, selon l’expression consacrée de Georges Canguilhem, philosophe, médecin, et spécialiste des questions de philosophie médicale. Cela signifie donc que cette dimension artistique, qui est inhérente au soin, n’est pas étrangère à la science et qu’il convient d’interroger la nature de leurs relations. Il n’est donc pas impossible en théorie de faire de la science qui prendrait l’ostéopathie pour objet. Tout l’objectif de ce livre consiste d’ailleurs à discuter des conditions satisfaisantes pour procéder à une telle démarche. Aussi étrange que cela puisse paraître, ce travail n’a pas encore été réalisé et il était important de poser la première pierre à cet édifice. Cette entreprise permet au passage de clarifier une bonne partie du lexique avec lequel les ostéopathes ne sont pas toujours très à l’aise. Il existe en effet une certaine frilosité qui consiste à conserver une distance méfiante avec la démarche scientifique dans la communauté ostéopathique.

 


Quel serait l’intérêt pour l’ostéopathie de procéder à une telle démarche ?

 

Lorsqu’un Etat accepte d’autoriser une activité de soin, ce qui est le cas de l’ostéopathie depuis 1960 et a fortiori depuis 2002, il existe des engagements réciproques qui découlent de cet évènement. L’un d’entre eux passe par un devoir de transparence. Cette exigence implique pour les professionnels de justifier la pertinence de leur art à travers des éléments de preuve. Aujourd’hui ces éléments doivent être véhiculés par l’intermédiaire d’une démarche scientifique qui emprunte une méthode permettant d’engager des discussions rigoureuses appelées « doctrines ». Tel est l’horizon pour qu’une discipline obtienne une certaine robustesse.
Au demeurant, s’il s’agit d’une nécessité de l’ordre de l’honnêteté intellectuelle, la profession a pourtant longtemps essayé de s’y soustraire. Pour cela, elle a parfois mobilisé des arguments indiquant des craintes légitimes que certains pouvaient éprouver. J’ai entrepris de discuter ces différents éléments qui ne doivent pas être pour autant écartés, en indiquant les raisons pour lesquelles certaines insuffisances ou certaines incompréhensions pourraient être apaisées en se confrontant à cette démarche.
Il existe également la question de la reconnaissance institutionnelle. La démonstration scientifique de ce qu’est l’ostéopathie permettra de faire bénéficier aux patients d’une meilleure accessibilité à des prises en charge pluridisciplinaires. Si certains ostéopathes sont déjà intégrés dans des équipes de soins et si naturellement des ostéopathes libéraux travaillent d’ores et déjà en étroite collaboration avec d’autres professionnels du milieu sanitaire, l’établissement d’une science ostéopathique permettra une meilleure communication avec les autres exercices de soin ainsi qu’avec les diverses institutions. C’est de la fécondité de ces échanges qu’aboutissent des avancées en termes d’accessibilité pour les patients et naturellement des perspectives de recherche qui sont des enjeux tout à fait considérables dans un avenir proche.

 

Quelles seraient les conséquences pour les patients des ostéopathes ?

 

Dans la relation thérapeutique, le patient est souverain dans l’appréciation du soin qu’il reçoit. Pour que cette condition puisse se réaliser, il faut qu’il soit préalablement informé. L’information délivrée doit par conséquent être conforme aux connaissances médicales avérées. C’est que l’on nomme de plus en plus la « pratique éclairée ». C’est à dire que le praticien propose des stratégies thérapeutiques en les explicitant et le patient fait son choix en conscience. Ainsi, faire de la science ostéopathique est la garantie que la liberté du patient puisse être véritablement respectée. Il s’agit donc en quelque sorte de chercher à s’assurer de la liberté du consentement de son patient.


Comment faut-il s’y prendre ?

 

C’est là tout l’enjeu de cet ouvrage. L’approche épistémologique est une appellation savante pour se demander simplement quelles sont les conditions pour qu’une science de l’ostéopathie soit envisageable. Pour y répondre le plus fidèlement possible, il m’a semblé qu’il s’agissait d’essayer de se poser les questions les plus appropriées. J’ai donc souhaité le diviser en trois parties. La première se demande si une science ostéopathique est possible. La seconde questionne sa démarche. La troisième cherche à en saisir les fondements.


Cela va-t-il modifier l’enseignement de l’ostéopathie ?

 

Ce livre aborde automatiquement la question de l’identité de la profession d’ostéopathe. Il invite à une exploration qui va peut-être confirmer certains éléments et formuler des critiques vis-à-vis de d’autres. Telle est la rigueur scientifique qui ne cherche pas à s’asservir à une quelconque idéologie. Ainsi, les formateurs pourront s’appuyer sur des données plus fiables pour crédibiliser les messages qu’ils transmettent, ce qui est une rigueur nécessaire lorsque l’on s’intéresse à une éthique vertueuse de l’enseignement. De plus, l’accessibilité de ces connaissances permettra également aux étudiants de jouir d’une autonomie intellectuelle plus importante et de renforcer la confiance en leurs pratiques.